On se le cachera pas, pour plusieurs, sport = torture.
Je sais pas si c’est des séquelles des cruels cours d’édu quand on était kids; des tout aussi cruelles games de ballon-chasseur faites de ballons gunnés dans nos faces avec l’énergie du désespoir par un Thor en culottes courtes ou si c’est juste par manque d’intérêt, mais reste que faire du sport peut être synonyme de proverbiale marde.
Peut-être un doux mélange de tout ça.
Des fois, c’est juste une question physique aussi. Ce sont pas tous les corps qui sont bâtis pour performer. Je dis « performer », mais je veux peut-être juste dire « faire en sorte que l’activité cardiaque augmente un brin pis que l’endorphine embarque post-effort-peu-importe-l’intensité-de-l’effort ».
Des fois, on traîne des blessures, des conditions physiques, des conditions mentales, des horaires de fou, des traumatismes.
Y a mille raisons toutes valides (d’autres moins, c’est certain) qui existent qui peuvent freiner l’élan.
Personnellement, j’ai absolument toujours aimé bouger.
Paradoxalement, j’ai toujours beaucoup haï faire du sport.
Mais en vieillissant j’ai compris que j’haïssais le sport quand j’étais forcée de. Ça a créé une aversion très intense pour moi envers le sport. L’environnement de t’ça. Le message de t’ça. Les attentes de t’ça. Beaucoup de « t’ça ».
Et ça a pris du temps avant que je comprenne que faire du sport et bouger, c’était pas nécessairement la même chose.
Si je me regarde avec nostalgie dans ma version du passé, toute jeune, j’étais celle qui partait en ski de fond dans le long sentier derrière sa maison accompagnée de son chien de marque inconnue (il était petit et poilu et adorable et me servait, je crois, à me protéger des coyotes, des mamans ourses, des carcajous ou encore des extra-terrestres/ma phobie).
J’étais la p’tite qui se garrochait sur une crazy carpet et qui remontait la côte du rang en courant pour recommencer (toujours suivie du chien de survie). Celle qui se rendait en vélo au pont en bas de la côte pour aller pêcher à la rivière, avec sa canne à pêche faite sur place à partir d’une simple branche, d’un fil et d’un hameçon. Je passais quelques minutes à trouver des vers et hop : j’avais ensuite plus qu’à remonter la côte en pédalant ma vie, avec ma chaudière de ménés à donner à mes chats (j’étais Tom Sawyer on dirait ben).
J’étais celle qui patinait. Qui jouait au baseball avec les voisins. Qui courait des heures durant pour attraper des lucioles les soirs d’été.
J’étais celle qui lançait un ballon de basket dans le panier accroché au garage après ses devoirs. Qui passait l’été dans l’eau à parfaire ses plongeons. Qui jouait au aki tuseule pour pratiquer ses moves. Qui passait des après-midi à canner des balles de golf le plus loin possible dans le champ en face de sa maison au grand désespoir de sa mère qui revoyait pu jamais ses balles.
J’étais celle qui dansait jusqu’à l’évanouissement en écoutant des vinyles dans la cave. Qui pratiquait sa gymnastique quand personne regardait. En plus, pour vrai, j’étais douée. J’étais hyperlaxe, donc amplement capable d’incarner le Cirque du Soleil quand j’avais 8 ans. Pu asteure (hashtag sciatique). Asteure être hyperlaxe, c’est juste un plan pour me fouler une cheville quand je fais absolument rien, sinon vivre.
Donc oui, j’étais une petite fille active.
Les années ont passé et j’ai continué à bouger… autrement. Les cours d’aérobie et de step (dans le fond du local pour que personne me regarde), les cours d’aquaforme, le gym dans un gym de femmes (principalement pour me faire des bras et améliorer mes performances de drum lol), les sessions de 30 minutes top chrono chez feu Curves, le roller derby. Des activités de bougeage avec des femmes ou avec principalement des femmes. Pour le plaisir de bouger.
Mais les centres de femmes ont fermé et j’ai perdu mes repères. Le derby était vraiment difficile pour mes chevilles lousses, pour mon équilibre pas yâble et pour mon dos blessé lors d’une chute conne sur la glace. Alors j’ai cessé, malheureusement. Je me rends compte d’ailleurs que ce fut le seul sport d’équipe dans lequel je me sentais réellement à ma place. L’univers du roller derby, c’est juste merveilleux et inclusif à souhait (on s’en rejase).
Ce (beaucoup trop) long préambule pour en arriver à maintenant. Maintenant depuis cinq ans.
Depuis cinq ans, je vais faire des longueurs de piscine. Tuseule dans ma tête avec mes p’tites palmes aux mains, mes p’tites lunettes, mon p’tit Speedo high-tech pis mon p’tit cass.
Me convaincre que j’avais le droit d’y aller, tout comme passer par-dessus mes phobies sociales, a quand même été ardu au début. C’est niaiseux, mais quand tu souffres un peu d’anxiétés sociales, ça freine le guts de sortir et d’essayer des affaires par soi-même, pour soi-même.
La première fois, j’ai fait sept longueurs en m’étouffant. Pas de lunettes. Pas de technique de nage. Pas de technique de respiration. Avec un casque de bain en nylon trop lousse que je perdais tout le temps. Avec un maillot à froufrous zéro optimal pour faire du sport, mais efficace pour cacher mes grosses cuisses et mes grosses fesses que j’avais pas tant envie de mettre en évidence. Anyway, j’avais aucun maillot de sport. Ce fut d’ailleurs un parcours du combattant que de m’en trouver un par la suite (on se rejase de t’ça aussi).
Je nageais tout croche, en p’tit chien, en p’tit n’importe quoi à vrai dire. J’étais dans le chemin de tous les autres nageurs du couloir et je m’excusais de vivre en crachant de l’eau dans leur face (avec un peu de feu aussi parce que mes poumons me brûlaient en cibole).
Mais mon doux que j’étais fière d’être allée. C’était très certainement une petite (grande) victoire sur mon anxiété.
Le lendemain, j’y suis retournée et j’ai réussi à faire 10 longueurs.
Le lendemain du lendemain, 12!
Quand j’ai pogné le 20 les semaines suivantes, je capotais.
Ça voulait dire que j’avais réussi à nager pendant un kilomètre (20 longueurs aller-retour sur 25 mètres).
MOI, ÇA. J’AVAIS RÉUSSI À NAGER UN KILOMÈTRE SANS ARRÊT.
Pis en plus, J’AVAIS AIMÉ ÇA.
Aujourd’hui, dans mes semaines intenses, j’y vais trois fois par semaine.
Des fois, je passe deux mois sans y aller.
Mais je maintiens mon cap.
Parce que j’en ai besoin.
B-E-S-O-I-N.
Le nombre de longueurs à atteindre n’est plus tant mon objectif.
Y a des fois que je suis vraiment vedge pis que j’aimerais ça être bonne. Que je suis pas dedans, que c’est ardu pis que je me demande qu’est-ce que je fais là.
Y a d’autres fois que les astres sont alignés pis que je suis une estifie de machine qui m’épate moi-même pis je me dis : « Shit fille, les Jeux olympiques vont t’appeler demain, c’est certain. »
Il y a quand même quelques petits bémols. La natation, c’est un sport qui peut être, comment dire, tellement gratifiant, mais en même temps, tellement ingrat.
Parce que même si la natation regroupe toutes les catégories de corps, il réunit beaucoup de corps à la shape parfaitement découpée, ce qui peut créer beaucoup de complexes à regarder.
Il faut passer ce stade.
Il faut aussi passer le stade de se présenter soi-même aux autres à moitié à poil, avec un cass de rubber sur la tête.
Ça fait partie de la game.
Il faut faire fi des regards. Y compris, et surtout, du sien sur son propre corps.
Il faut aussi ne PAS se comparer à ses voisins de couloir qui parfois, avec leur grâce et leur rapidité, donnent juste le goût de garrocher son cass pis de sacrer son camp en riant d’amertume. On fait pas ça. On continue.
C’est un drôle de sport. On rit des personnes grosses qui s’y adonnent (« lol le seul sport qu’elles sont capables de faire anyway »), mais on adule les athlètes sveltes qui le pratiquent.
Va comprendre de quoi.
L’important néanmoins, c’est que j’ai trouvé le sport qui me convient parfaitement. Le sport qui me permet de lâcher toute : mon énergie, ma colère, mes frustrations, mon anxiété. Mon surplus de bonne humeur aussi des fois (HAHA).
Je ne serai jamais une joggeuse, une grande marcheuse ou une grande pousseuse de fonte… même si je voulais beaucoup. C’est parce que ça m’emmerde beaucoup trop et que j’ai besoin d’avoir un minimum de fun dans la vie.
Mais la natation, ça m’emmerde pas.
Demande-moi de courir deux kilomètres pis je pleure ma vie en implorant qu’on m’abatte comme un vieux ch’val malade après 1 min 2 s. Mais sacre-moi à l’eau pis je te nage le 2 km en une heure avec le sourire sincère d’une sirène sereine.
C’est peut-être rien pour le commun des mortels, mais c’est ma petite fierté personnelle pareil. Et ça aussi c’est important, je pense : l’accomplissement personnel.
Je te souhaite de trouver ton sport. Celui dans lequel tu auras du plaisir. Parce que quand ça arrive de le trouver, ben la game change et les motivations de bouger aussi.
Commentaires
Tu possèdes une très belle plume Hani cherie comme dirait ta maman. Très agréable de te lire.et la piscine,quel bien être. Bravo!
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